jeudi 29 janvier 2009

[Cinéma] Two Lovers

Wouhou, 2 critiques de films d'affilée, c'est la fête.

Faut dire que j'ai pas vraiment le temps d'alimenter ce blog de misère en ce moment, et pourtant ce sont pas les idées qui manquent.

Bref, comme d'hab, enjouaillez !




"Two Lovers" de James Gray (USA); avec Joaquin Phoenix, Gwyneth Paltrow, Vinessa Shaw, Isabella Rossellini, Elias Koteas, Moni Moshonov...

New York. Leonard Kreditor, bipolaire et suicidaire, hésite entre suivre le chemin tracé pour lui par ses parents, à savoir épouser la belle et sage Sandra, ou tout envoyer en l'air pour suivre Michelle, sa nouvelle voisine, rebelle, volage et pour tout dire aussi peu nette que lui...

Un an à peine après le déjà magnifique "La Nuit nous appartient", James Gray, qui nous avait pourtant jusqu'ici habitué à un tout autre rythme de travail (genre "trois films en treize ans") nous revient donc avec ce nouvel opus de prime abord fort différent des films noirs qu'il avait signés jusqu'alors...

Un film d'amour. Un drame romantique.
Où allait-il donc se perdre après les noires fulgurances de "Little Odessa" ou "The Yards", pouvait-on légitimement se demander (si si, on pouvait... ).

Et la première évidence c'est que, malgré ce supposé changement de registre, Gray continue - et de fort belle manière - à creuser le même opiniâtre sillon...

Car "Two Lovers", même s'il n'emprunte rien au ressorts du polar ou du thriller, est avant tout, d'un point de vue pûrement cinématographique, un mélo déguisé en film noir.
Ou le contraire...
Un mélo pour le fond, un film noir pour la forme, en somme.

Et la force de Gray est avant tout d'avoir réussi la gageure de passionner - voire même de bouleverser - en racontant l'histoire la plus simple du monde (si pas aussi la plus vieille du monde) : un homme, deux femmes, trois possibilités.
Point.

Mais en l'emballant de la plus fine et subtile des manières, avec un art consommé de la mise en scène et une manière unique de réaliser de véritables pépites visuelles sans même avoir l'air d'y toucher (et en évitant surtout soigneusement le piège de la démonstration et du "regarde comme je filme !"), le réalisateur transcende véritablement son sujet.

La force de l'écriture, usant du moindre détail, de la moindre scène pour renforcer la folie, la fièvre sous-jacente à l'histoire, achevant de transformer "Two Lovers" en tragédie à la résonnance universelle...

Bien entendu, il faut accepter certains partis-pris, voire certains poncifs.
Surtout se dire que le personnage de loser incarné par Joaquin Phoenix est finalement très loin de l'idée que l'on peut se faire de ce genre de type (y a qu'à voir comme il se transforme lorsqu'il est sur une piste de danse ou simplement se dire que, tout moche et tordu qu'il soit, il arrive à se lever Gwyneth Paltrow ET l'autre damoiselle... Ah ah !).

Mais tout ça n'est rien à côté de la splendide ambivalence qui habite chacun des personnages (les principaux, bien entendu, mais aussi la mère de Leonard ou l'amant de Michelle, par exemple), au maëlstrom existentiel qui sous-tend chacune de leurs relations, à la sublime lumière crépusculaire qui habille le tout et surtout à l'excellence générale du casting.

De ce côté-là, on saluera la performance magnifique de Gwyneth Paltrow (qui semble ici justifier l'Oscar reçu il y a quelques années pour "Shakespeare in Love") ainsi que celle d'Isabella Rossellini, extraordinaire en mère prète à tout accepter pour son fils (la scène qu'elle partage avec Joaquin Phoenix dans l'escalier de leur immeuble est un modèle du genre).

Et bien entendu, on applaudira à tout rompre le supposé baroud d'honneur (il reviendra sur sa décision d'arrêter le cinéma, c'est sûr) de Joaquin Phoenix, justement, dont la performance hallucinante - sur laquelle s'appuie d'ailleurs une partie du film - restera pour longtemps dans les mémoires...

Sombrement romanesque, voila donc un film qui l'air de rien, ressemble quand même "vachement à un chef-d'oeuvre", comme disait l'autre...

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